sábado, 22 de enero de 2011

Ancien français.- La grammaire

SOMMAIRE
 
Déclinaison à deux cas  et l'ordre des mots
L'article
L'emploi du genre
La féminisation
La numération


Les verbes
Le participe passé
La phrase
La création des latinismes 


- déclinaison à deux cas

Au plan morpho-syntaxique, l'ancien français conservait encore sa déclinaison à deux cas  et l'ordre des mots demeurait assez libre dans la phrase, généralement simple et brève.

Jusqu'au XIIIe siècle, les deux cas de l'ancien français sont les mêmes que pour la période romane: le cas sujet (CS) et le cas régime (CR) issu de l'accusatif latin. 

Déclinaison I:
CS   (cas sujet)
CR   (cas non sujet)
li murs  (le mur)
le mur   (le mur)
li mur       (les murs)
les murs   (les murs)
Déclinaison II:
CS   (cas sujet)
CR   (cas non sujet)
li pere   (le père)
le pere   (le père)
le pere      (les pères)
les peres   (les pères)
Déclinaison III:
CS   (cas sujet)
CR   (cas non sujet)
li cuens  (le comte)
le comte (le comte)
li comte     (les comtes)
les comtes (les comtes)

la déclinaison à deux cas a commencé à s'affaiblir dès le XIIIe siècle et, à la fin du XIVe siècle, le processus était rendu à son aboutissement: il ne restait plus qu'un seul cas, le cas régime. C'est sur celui-ci que repose la forme des mots français d'aujourd'hui.


- L'article

Une autre innovation concerne l'apparition de l'article en ancien français, alors que le latin n'avait pas d'article, son système sophistiqué de déclinaison pouvant se passer de ce mot outil. Le français a développé un système d'articles à partir des démonstratifs ille/illa/illud, qui ont donné les déterminants appelés «articles définis».

Les articles en ancien français se déclinaient comme les noms en CS et CR, au masculin comme au féminin.

Alors qu'en français moderne, on a l'opposition le / la / les, l'ancien français opposait li / le (masc.), la (fém.) et les (plur.).

 Article
défini
MASCULIN
FÉMININ

Singulier
Pluriel
Singulier
Pluriel
CS
li
li
la
les
CR
le
les

Pour l'article indéfini, ce sont les formes uns / un (masc.) et une (fém.), alors que le pluriel était toujours marqué par uns (en français moderne: des).

Article
indéfini
MASCULIN
FÉMININ

Singulier
Pluriel
Singulier
Pluriel
CS
uns
uns
une
unes
CR
un




 - L'emploi du genre

De façon générale, la marque du genre se trouvait en latin dans la désinence des noms et des adjectifs, c'est-à-dire dans leur terminaison.
Dans l'évolution du latin vers l'ancien français, les marques du genre ont perdu leurs caractéristiques d'origine. Pour simplifier la description, on peut indiquer les grandes tendances suivantes:

1) La déclinaison féminine en -as a donné des mots du genre féminin en français : rosam > rose / rosas > roses.

2) Les pluriels neutres latins en -a ont également donné des mots au féminin en français : folia > feuille; arma > arme.

3) Les mots masculins latins en -is sont devenus masculins en français : canis > chien; panis> pain; rex/regis > roi.

4) Les noms latins terminés en -er sont aussi devenus masculins : pater > père; frater > frère; liber > livre.

Pendant la période romane, le latin a perdu le neutre qui a été absorbé par le masculin ; par exemple, granum > granus > grain (masc.).

Du neutre latin, granum et lactis sont passés au masculin en français ; du masculin latin, floris est passé au féminin en français ; par contre, gutta et tabula sont restés au féminin ;
mais burra (bure) a conservé le féminin du latin pour passer au masculin lorsqu'il a désigné le «bureau» en français.

Cependant, beaucoup de mots d'ancien français ont changé de genre au cours du Moyen Âge.
Ainsi, étaient féminins des mots comme amour, art, évêché, honneur, poison, serpent; aujourd'hui, ces mots sont masculins.

À l'opposé, des mots aujourd'hui féminins étaient alors masculins: affaire, dent, image, isle (île), ombre, etc.


- La féminisation

Voici une liste de mots au masculin et au féminin:
Masculin
Féminin
empereur
devin
medecin
lieutenant
chef
apprenti
bourreau
emperiere (emperière)
devine
medecine
lieutenande
chevetaine
apprentisse
bourelle

Notons aussi l'opposition damoiselle (fém.) / damoisel (masc.) ou damoiselle/damoiseau pour désigner les jeunes nobles, qui n'étaient pas encore mariés;

au cours des siècles, seul le mot demoiselle est resté dans la langue, alors que les formes masculines damoisel/damoiseau sont disparus.

Après tous ces changements, on ne se surprendra pas qu'on en soit arrivé à une répartition arbitraire des genres en français moderne.
Dans le Guide d’aide à la féminisation des noms (1999), les auteurs rapportent des exemples de termes féminisés tirés du Livre de la Taille de Paris de l’an 1296 et 1297 :

aiguilliere, archiere, blaetiere, blastiere, bouchere, boursiere, boutonniere, brouderesse, cervoisiere, chambriere, chandeliere, chanevaciere, chapeliere, coffriere, cordiere, cordoaniere, courtepointiere, couturiere, crespiniere, cuilliere, cuisiniere, escueliere, etc.
  

Il faut mentionner également le système de numération qui a profondément été modifié en ancien français. 
Les nombres hérités du latin correspondent aux nombres de un à seize
Le nombre dix-sept, par exemple, est le premier nombre formé d'après un système populaire (logique) qui sert pour tous les nombres suivants: 10 + 7, 10 + 8, 10 + 9, etc.



En ce qui concerne les noms des dizaines, le latin possédait un système décimal;
ainsi, dix (< decem) vingt (< viginti), trente (< tringinta), quarante (< quadraginta), cinquante (< quinquageni) et soixante (< sexaginta) sont d'origine latine.

Mais, l'ancien français a adopté dès le XIIe siècle la numération normande (d'origine germanique) qui était un système vicésimal, ayant pour base le nombre vingt (écrit vint ou vin).

Ce système était courant chez les peuples d'origine germanique. Selon ce système, on trouvait les formes :
vingt et dix (écrites vins et dis) pour 30,
deux vins pour 40,
trois vins pour 60,
quatre vins pour 80,
cinq vins pour 100,
six vins pour 120,
dis vins pour 200,
quinze vins pour 300, etc.

Encore au XVIIe siècle, des écrivains employaient le système vicésimal. Ainsi, Racine écrivait à Boileau: «Il y avait hier six vingt mille hommes ensemble sur quatre lignes.» 

Le système de numération du français standard est donc à la fois d'origine latine et germanique. Quant à un numéral comme soixante-dix, c'est un mot composé (soixante + dix) de formation romane populaire; il faudrait dire trois-vingt-dix pour rester germanique (normand).

Le numéral quatre-vingt-dix est également d'origine normande auquel s'ajoute le composé populaire [+ 10].

C'est l'Académie française qui, au XVIIe siècle, a adopté pour toute la France le système vicésimal pour 70, 80, 90, alors que le système décimal (avec septante, octante, nonante) étaient encore en usage de nombreuses régions; d'ailleurs, ce système sera encore en usage dans certaines régions en France jusque qu'après la Première Guerre mondiale.


- Les verbes

Au Moyen Âge, plusieurs verbes avaient des infinitifs différents de ceux d'aujourd'hui. Ainsi, au lieu de l'infinitif en -er (issu du latin des verbes en -are, par exemple dans cantare > chanter), on employait celui en -ir: abhorrir, aveuglir, colorir, fanir, sangloutir, toussir, etc.

On trouvait aussi des infinitifs tout à fait inexistants aujourd'hui: les verbes tistre (tisser), benistre (bénir) et benire (bénir).

De plus, de très nombreux verbes, fréquents au Moyen Âge, sont aujourd'hui disparus:
ardoir (<ardere: brûler), bruire (<*brugere: faire du bruit), chaloir (<calere: avoir chaud), doloir (<dolere: souffrir), enfergier (<en fierges: mettre aux fers), escheler (<eschiele: monter dans une échelle), ferir (<ferire: combattre), nuisir <nocere: nuire), oisever (<*oiseus : être oisif), plaisir <placere: plaire), toster <*tostare: rôtir), vesprer < vesperare: faire nuit).

L'ancien français a fait disparaître certains temps verbaux du latin:
-         le plus-que-parfait de l'indicatif (j'avais eu chanté),
-         le futur antérieur (j'aurais eu chanté),
-         l'impératif futur (?),
-         l'infinitif passé (avoir eu chanter),
-         l'infinitif futur (devoir chanter).

En revanche, l'ancien français a créé deux nouvelles formes:

-         le futur en -rai et le conditionnel en -rais.

De plus, l'emploi du futur n'a pas toujours été celui qu'il est aujourd'hui. Beaucoup écrivaient je priray (prier), il noura (nouer), vous donrez (donner), j'envoirai (envoyer), je mouverai (de mouver), je cueillirai (cueillir), je fairai (faire), je beuvrai (boire), je voirai (voir), j'arai (avoir), je sarai (savoir), il pluira (pleuvoir).

la conjugaison en ancien français ne s'écrivait pas comme aujourd'hui. Jusqu'en moyen français, on n'écrivait pas de -e ni de -s à la finale des verbes de l'indicatif présent: je dy, je fay, je voy, je supply, je rendy, etc.


- Le participe passé

Le participe passé (avec avoir et avec être) existait en ancien français, mais il n'y avait pas de règles d'accord systématique. On pouvait au choix faire accorder le participe passé avec être ou sans auxiliaire, mais on n'accordait que rarement le participe avec avoir.

anc. fr.: Passée a la première porte.
fr. mod.: Elle a passé la première porte.

En général, le participe passé ne s'accordait pas avec un nom qui le suivait:
-         Si li a rendu sa promesse.

Pour ce qui est de l'orthographe, elle n'était point encore fixée et restait très calquée sur les graphies latines. 



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